NURSE - Mademoiselle, je vous prie de descendre de cette table et tout de suite !
ALLEECE - Naaaan ! Et de toute manière tu n'es pas ma mère !
NURSE - Votre mère ne peut s'occuper de vous, elle a du travail. Et combien de fois vous ais-je répété de ne pas me tutoyer ?
ALLEECE - Elle n'est jamais là de toute manière ! Et je m'en fiche ! Appellez mon père si vous voulez.

Elle n'avait même pas eu de répondre si bien que j'étais déjà ailleurs, à gambader dans un coin de cette immense bâtisse où je logais avec mes parents et différentes nurses toutes aussi inutiles que des singes devant une télévision. J'appartiens à une famille noble. J'étais une sorte de duchesse d'après ce que mon père m'avait déclaré il y a quelques années. Ou un rang plus bas, je ne sais pas. J'étais comme sous le choc au départ et ensuite je m'y suis fait. A quoi bon se lamenter pour des sottises pareilles. Il y avait de la place, je pouvais faire ce que je voulais à quelques exceptions près mais je me sentais terriblement seule, je n'étais pas épanouie. Toutes les jolies robes que l'on m'offrait chaque semaine, tout l'or du monde ne valait pas la solitude que je pouvais ressentir à chaque instant. J'aimerais être " normale ". Mère m'a dit un jour que cela était tout à fait compréhensible pour une jeune fille de mon âge et surtout à cette époque.

Citation :

Un conte de fée ? Laissez-moi réfléchir un court instant. Non, ce n'est pas une vie ! J'en ai marre, marre ! J'aimerais pouvoir sortir, voir des gens, aller à l'école mais non. Mère refuse catégoriquement. Je cite " Il y a de multiples dangers dehors que tu ignores ma belle Alleece, il faut que tu t'éloignes de tout cela, il faut que tu prépares ton avenir. Un très beau se profile à l'horizon, je le pressens. " Pourquoi je ne pourrais pas être normale comme tout le monde ? Je ne me soucie guère de ce que mon titre peut m'apporter dans le futur. Je passe mes journées à lire, à m'instuire, à prendre des cours de musique avec un professeur attitré. Mais nous ne sommes plus au Moyen-Âge à ce que je sache ? A moins que mes parents font une lourde fixette là dessus. Ces robes ridicules me collent à la peau. Des milliers que jeunes filles rêveraient d'être à ma place et pourtant non, je ne m'y fais toujours pas. C'est si éprouvant de ne pas pouvoir être maître de son destin. Qu'un prince aussi charmant soit-il vienne me délivrer de cette prison ! Oui, je considère cette demeure comme telle. Elle est si étrange, si lugubre et regorge d'endroits qui me donnent la frousse. Que faire ? Que dire pour que mes parents ne soient pas blessés ? A vrai dire, je ne les voit pratiquement jamais, toujours en voyage d'affaires ou ailleurs. Enfin, c'est ce que ma gouvernante, Kopie, me dit toutes les semaines. Ce n'est pas une vie, c'est un calvaire.
Alleece - le 6 juin 1998.

. . . . .

KOPIE - Nous avons une heure avant ton cours d'histoire.
ALLEECE - Je n'aime pas ce professeur, je le trouve nul et trop autoritaire !
KOPIE - Tu devrais arrêter de te plaindre, de nombreuses personnes
ALLEECE - en lui coupant subitement la parole pour terminer sa phrase. voudraient être à ma place. Oui, je sais. Mais pourquoi ne pas échanger ? Je prends la place d'une fille dans la rue et vice versa. Je préfère ceci que de rester cloîtrer ici à ne rien faire.
KOPIE - en lui prenant la main. Ils veulent te préserver ma puce.
ALLEECE - Ne sommes-nous pas au 21e siècle ? Sont-ils restés au Moyen-Âge, au temps et rois et des princes ?
KOPIE - en s'abaissant pour être à la hauteur de la petite fille. Tu ne peux pas comprendre ...
ALLEECE - Oh non je ne comprends pas !
KOPIE - Tu n'as que quatorze ans, c'est normal de te sentir enfermée alors qu'à ton âge, beaucoup d'enfants sont en train de s'amuser avec leurs amis dans le parc. Tu sais bien que tes parents ...
ALLEECE - Quoi mes parents ? Ils sont nuls, nuls ! Ils ne t'arrivent même pas à la cheville, toi au moins, tu es là, tu m'écoutes et eux, ils n'ont jamais le temps. C'est normal aussi ça ?
KOPIE - Dans ce cas de figure là, tu as raison. Je peux comprendre ta douleur, ce que tu ressens mais ils n'ont pas le choix.
ALLEECE - J'appartiens à une famille " noble " et pourtant cela ne me procure rien de bon. Heureusement qu'ils me laissent encore le choix sur mes croyances ... sinon je ne sais pas ce que je leur ferais. Pars avec moi Kopie, on s'en va ailleurs et on fait le tour du monde en bateau, en avion ! Je veux visiter New York, la Tour Eiffel, rencontrer des gens ! S'il te plait ...


Kopie était la seule personne qui valait la peine d'être écoutée. C'est une jeune femme d'une vingtaine d'années, belle et attentionnée. Je ne sais pas ce que je ferais sans sa précense et notre complicité qui m'est si précieuse. Kopie est une sorte de deuxième mère, largement plus présente et heureusement d'ailleurs. Elle m'a toujours dit qu'elle aimerait avoir mes cheveux, elle disait qu'ils étaient blonds comme les blés au soleil. Elle est brune aux cheveux longs et se fait toujours un chignon court que je n'arrêtais pas de toucher lorsque j'étais plus jeune. Je possède en tout cinq nurses mais Kopie se démarque victorieusement des autres. Elle m'a également annoncé qu'elle aurait m'avoir comme fille puisqu'elle n'avait jamais eu la chance d'en avoir. Je lui avais répondu ainsi " J'aurais aimé t'avoir comme mère ma Kopie ". Elle a immédiatement sourit et je fis de même.

KOPIE - Allons cueillir quelques cerises pour le goûter, veux-tu ?
ALLEECE - Oui, pourquoi pas ! répondis-je en sautillant de joie.
KOPIE - J'ai vu que tu tenais un journal ? Tu as raison, il ne faut pas gâcher ses souvenirs si précieux.
ALLEECE - Oui ... Tiens, il y a des cerises par ici !

. . . . .

Confortablement installée sur un fauteuil en cuir rouge, en compagnie de Kopie et de mon chat Matou - très original, je vous l'accorde. , je lisais un roman qui racontait l'histoire d'une jeune fille qui rêvait d'être un petit rat de l'opéra tout en sirotant une limonade au citron. Je déposai le verre sur la table ronde du salon. Ce dernier était tout simplement immense, les nombreux meubles ne pouvaient pas combler les nombreux espaces vides. Je me reconnais un peu dans cette petite fille, je possède une grande salle de gym où je peux m'exercer chaque jour - où je dois m'exercer plutôt . Depuis toute petite, je fais de la danse classique, moderne, jazz ... cela me passionne et me libère.
Soudainement, mon père arriva en trombe dans le salon, il était en larmes et arrivait à peine à prononcer quelques mots.

PERE - Ta .. mère .. est ... morte !

Je me levais subitement, prise de panique. Je ne pouvais pas y croire, c'était impossible. Ma mère ? Elle qui était si en forme ! Cela me paraissait louche que ces derniers temps, elle passait pratiquement tout son temps en ma compagnie, me chérissait comme personne. Peut-être redoutait-elle le pire ? Savait-elle qu'elle allait mourir bientôt ? Tant de questions se posaient dans mon esprit si troublé.

ALLEECE - Je veux la voir !

Mais malheureusement, il refusa. Peut-être qu'il ne voulait pas me faire souffrir ? Je me dirigeai vers lui tout en essayant de sortir, je me débattais de toutes mes forces, pleurant à chaudes larmes mais rien n'y faisait. Comprenait-il ma souffrance ?

ALLEECE - Père, je vous en prie ! C'est ma mère tout de même. Vous ne pouvez pas me refuser cela !

Sa réponse fut toujours négative.

ALLEECE - Mais ... Merde ! T'es qu'un salaud !

Il me mit une gifle que j'avais bien mérité. Injurer mon père ? C'était le comble ! Mais je ne le regrettais pas puisque je le pensais sincèrement.

PERE - Ca t'apprendra de m'injurer de la sorte. File dans ta chambre et n'en sors plus !

Je m'exécutai. De toute manière, je n'avais rien d'autre à faire qu'attendre et attendre sans broncher. Je verrais peut-être le corps de ma pauvre mère lorsquils le sortiront de la chambre.

Citation :

Je me sens vide, désespérée, sans avenir. Que faire pour être libérée de ce terrible cauchemar ? J'ai dix-huit ans et je pense qu'il est temps de prendre mes décisions moi-même et personne ne m'y fera abstraction, Parole d'Alleece Hawkins.

Citation :

Je pars, c’est décidé. Je ne peux supporter davantage d’être enfermée ici sans ne rien pouvoir dire, je suis comme muette depuis ces derniers jours, j’ai besoin d’air frais, de rencontrer du monde … J’ai pris ma décision, c’est mon choix. J’en ai discuté avec Kopie ce matin, elle était triste mais elle ne faisait finalement qu’approuver mon choix, prétextant que j’avais entièrement raison de voler de mes propres ailes si telle était ma décision. C’est pour ça que je l’aime Kopie. J’aimerais bien la revoir … un jour. Elle est tellement gentille et douce. Quand à père, il trouve cela totalement absurde. Je suis peut-être trop impulsive mais j’assume, je suis comme je suis et personne ne pourra me changer, pas même cette chère Kopie. A dix-huit ans, je pense que je suis assez mâture pour savoir ce que je veux.

ALLEECE – Père, je suis désolé mais je pars dans quelques heures. Je voulais vous dire un simple au revoir en espérant que ce ne sont pas des adieux.
PERE – Ma chère et douce Alleece, je crois qu’il est temps pour toi de choisir. Tu as le droit de rester ici ou de partir mais sache que je ne t’accepterais plus dans cette maison si tu nous quittes.
ALLEECE – Mais Père ! Vous savez très bien que je ne rêve que de ça, partir mais je ne peux me contraindre à ne pas revenir un jour ici. Vous aurez sûrement oublier dans quelques années …
PERE – Oh non, la mémoire de ton vieux père est intacte et le restera, ne t’en fais pas. Lui répondit-il en déposant un baiser sur son front.
Il savait qu’en faisant ce choix, il la perdra pour toujours mais qu’importe, il ne peut pas obliger sa fille à rester elle qui souhaite s’en aller.

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Citation :

Cela fait maintenant deux ans que je suis partie. J’ai emporté tout mon argent de poche qui s’élevait à quelques milliers d’euros. Kopie me donne de ces nouvelles chaque mois et nous nous écrivons de temps à autre. Père est dans un état … il ne se remet toujours pas de mon départ et je le comprends. Mais je ne reviendrais pas, c’est totalement impossible. Je me sens libre comme l’air et c’est très bien comme cela. Je suis peut-être dure mais il s’y fera. C’est étrange de ne plus vouvoyer les gens mais je m’y habituerai à l’avenir.
Je suis allée en France, en Asie et au Brésil. Les cours de langues vivantes m’ont au moins servis à une chose. Là bas, j’y ai rencontré Lewis, un jeune homme de vingt-cinq ans qui passait des vacances à Paris. On a tout de suite sympathisé et il m’a également raconté qu’il habitait à Boston. Je lui ai tout dit, mes origines, que je suis issue d’une famille assez noble mais il me comprend. C’est étrange à dire mais on sort ensemble, c’est avec lui que j’ai fait ma toute première fois et je me sens bien !

LEWIS – J’ai une proposition à te faire. Tiens, ton café.
ALLEECE – Ah oui ? Merci.
LEWIS – Je t’ai déjà dit que je logeais à Boston, hein ?
ALLEECE – Oui et alors ?
LEWIS – J’y retourne demain. Voudrais-tu m’accompagner ?
ALLEECE – Oh et bien c’est une très gentille proposition que tu me fais là Lewis ! Mais..
LEWIS – Mais quoi ?
ALLEECE – Où se situe Boston ?
LEWIS – Oh, aux Etats-Unis.
ALLEECE – Je suis partante alors !
LEWIS – On y logera dans mon petit appartement et ce sera top.
ALLEECE – Je n’en doute pas.

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Citation :

Boston nous voilà arrivés ! C’est tellement joli ici. L’appartement est certes, assez petit pour nous deux mais il reste tout à fait convenable. Mais cela me déplait un tantinet. J’ai toujours été assez indépendante et vivre avec quelqu’un me dérange assez mais je n’ose pas lui dire, il est si bon pour moi. Je suis face à une nouvelle vie, une page se tourne et j’en suis certaine, l’avenir me réserve des tas de surprises.

LEWIS – Hum … Alleece. J’ai quelque chose à t’annoncer.
ALLEECE – Quoi ?
LEWIS – Je pars, enfin il faut que tu partes. Un ami a perdu son logement et...
ALLEECE – Laisse tomber, j’ai compris. Tu me vires quoi ? Tu te fiches de moi j’ai l’impression ! Je suis conne de t’avoir cru.
LEWIS – Mais j’ai de l’argent, je peux t’en donner, tu pourras loger ailleurs et tout ira bien.
ALLEECE – Ne t’inquiète pas, j’ai tout ce qu’il faut.

Citation :

Et voilà comment notre pseudo-amitié se termine avec ce Lewis. Mais quel idiot ! Je peux bien comprendre qu’il ait des amis mais me mettre à la porte ? Non, ça je n’arrive pas à le digérer. En même temps, j’ai eu ce que je voulais : l’indépendance et bien je vais l’avoir à présent. J’ai déjà visité deux appartements donc l’un est plutôt pas mal. J’ai besoin d’un logement et vite de toute manière, qu’il rentre dans mes critères ou non.

Citation :

Trois mois que j’habite dans cet appartement ! Trois mois ! Je m’y sens plutôt bien, mes voisins ne me dérangent pas trop et je dois bien avouer que Boston est une très belle ville ! Journal, je crois que je vais cesser un peu de t’écrire chaque jour tant je n’ai pas le temps de m’ennuyer.

Installée sur une des nombreuses tables du café, je lisais un magasine de mode. La bâtisse grouillait de monde, le bruit m’empêchait de me concentrer un minimum sur ma lecture. C’était le café où j’avais l’habitude d’aller au moins une fois par semaine. Je grignotais les petits biscuits apéritifs mis en évidence sur la petite table. Pour une fois, je n’avais envie de rien d’autre. Soudain, un homme qui devait avoir plus de vingt-cinq ans, s’approcha de moi, légèrement bourré.

HOMME – Pourrais-je vous proposer un verre, jolie demoiselle ?
ALLEECE – Non merci, vous voyez bien que je n’ai pas soif. [/color]
HOMME – s’adressant au serveur Un cocktail maison pour la jeune femme de la trois !
ALLEECE – Mais je vous ai dit que … Laissez tomber.
HOMME – rapportant le verre C’est quoi ton petit nom ?
ALLEECE – Alleece.
HOMME – Pas courant. Moi c’est Noah.
ALLEECE – C’est pour ça que je l’aime bien.
NOAH – Ca fait longtemps que t’habites à Boston ?
ALLEECE – Presque quatre mois.
NOAH – Donc logique que je ne t’avais toujours pas remarqué, une jolie fille comme toi, ça se remarque toujours.
ALLEECE – Ahah, vous me faîtes rire. Enfin tu me fais rire. Je ne dois sûrement pas être à la seule à qui tu dis ça.

Citation :

Ah ce satané Noah ! Finalement, je l’aime bien ce gars. Nous avons quelques points communs et il n’est pas négligeable que je t’annonce qu’on traîne assez souvent ensemble. C’est comme un jeu entre nous, on se cherche mais finalement je n’ai pas envi d’aller plus loin avec lui. Par méfiance peut-être. On a commencé à se donner des rendez-vous à plusieurs endroits et il m’a embrassé par surprise lorsque j’arrivais à l’un d’eux. C’était étrange. Il a voulu aller plus loin mais j’ai catégoriquement refusé. Je me suis faite bien avoir par Lewis alors… Que me prédira le destin ? Affaire à suivre …