" Evacuate the Dancefloor "

La soirée promettait d’être explosive. Je n’avais rien prévu à la base. Juste regarder une série B à la télé, boire une bière et puis me pieuter. Mais certainement pas de sortir et me torcher la gueule comme jamais. Mais j’avais croisé Théo en remontant, et de fil en aiguille, discutant comme si de rien n’était pendant au moins une demi-heure dans le couloir, on avait fini par décréter que si on avait tant de choses à se raconter … autant passer la soirée ensemble. Et on s’était rendu au pub du centre-ville. Pas celui où il bossait évidemment, ça ne l’aurait pas fait. Mais un sympa, où on avait enchaîné les verres.

J’avais l’habitude. Je tenais généralement bien l’alcool. Et des soirées entre potes, j’en avais eu plusieurs depuis mon émancipation. Mais ce soir, c’était une première. J’étais totalement stone. Totalement déglingué. Et je me marrais pour un rien. Une fille qui passait à côté de nous nous avait salués … et j’avais juste éclaté de rire. Il ne fallait pas chercher à comprendre. Un homme bourré, c’est fatal et c’est un langage d’australopithèque qu’il faut avoir.

Par la suite, nous nous étions rendus, me semble-t-il, dans une des boîtes les plus branchées de Boston. La musique y était géniale et drôlement forte, m’étais-je dis en posant mes mains, très maladroitement, sur mes oreilles. Mais je riais toujours. Je devais avoir l’air sacrément idiot. Mais je l’étais, donc je m’en foutais. Idiot de penser à elle tout le temps. Idiot de me prendre la tête à penser à elle. Idiot de n’avoir envie que d’elle. Idiot de ne plus me retrouver. Bref. Idiot. Alors je pouvais bien faire n’importe quoi ce soir.

C’était le but. Je voyais Théo qui se trémoussait avec une blondasse au milieu de la piste, pendant que la jolie brune (du moins elle paraissait être brune) se collait à moi au comptoir. « Tu danses ? » me demandait-elle. Et Moi je rigolais en rétorquant que si je dansais, je ne serais pas au comptoir à vider leurs bouteilles de Vodka. Mais elle ne lâchait pas le morceau. Alors, tant bien que mal, je la suivis. Ça tanguait un peu et je devais me tenir à elle. Elle riait fort. Et posait ses mains partout sur moi. Non que ça ne me gêne, mais je n’étais pas tellement en mesure de la repousser.

J’aperçus au bout d’un moment mon petit Théo qui partit aux toilettes. Il n’était pas dans un meilleur état que moi, et encore une fois ça me fit rire. On avait une de ces allures. Deux beaux gosses qui se retrouvaient dans une boîte branchée, entourés de filles supra canons et prêtes à nous obéir au doigt et à l’œil … et on était incapable d’assurer parce qu’on se fendait la poire. Et qu’on buvait plus qu’il ne fallait. Le voyant revenir au comptoir se commander une autre boisson, je le rejoignis, plantant la jolie brune sans m’en soucier. Lui donnant un bon coup dans le dos, sûrement plus fort que je ne le voulais, ou alors c’était mon imagination … quand on est saoul, on n’a pas trop conscience de notre force ou de notre faiblesse.

« Bah alors, vieux … » commençais-je d’une voix pâteuse, « Qu’est-ce t’arrive ? La blondinette, pas bon ? » Ce qui signifiait en gros : pourquoi es-tu parti aux chiottes seul au lieu de conclure avec la dite-blondinette. Mais entre mecs et entre australopithèques, on pouvait se comprendre. « Moi, y a une tite brune là, » continuais-je en pointant deux doigts à mes lèvres et esquissant un bisous, l’air de dire « c’est dans la poche ». Je me retournais pour la lui montrer. Mais c’était flou, et je ne la voyais nulle part … « Ou peut-être pas … » dis-je simplement en le regardant d’un air dépité avant de rire. Son verre arriva, je le prit et le bu d’une traite. Théo tenta de me pousser, en vain. L’alcool se répandit un peu partout au sol qui puait et collait déjà. Une crise de fou rire s’empara de nous à nouveau pendant que le serveur en amenait un autre à Théo.

Y avait pas à dire, c’était une soirée qu’on n’oublierait pas de sitôt … enfin, si on arrivait à s’en rappeler le lendemain.

CREDIT - Black lotus.