JE T'AIME MOI NON PLUS. Jude & Noah

La solitude est un sentiment partagé par tellement de gens que ce serait extrêmement égoïste d'éprouver sa solitude tout seul .

Assise dans sa voiture, Jude regardait la pluie battre contre les carreaux. Comment avait été sa vie ces derniers temps ? Catastrophique ? Désastreuse ? Elle ne savait même plus par où commencer. Il y avait eu la maladie de sa mère qu’elle avait du affronter. La soutenir, l’emmener chez le médecin, l’emmener à l’hôpital, payer ses soins, la soigner … Bien sûr cela n’avait jamais été une corvée. Depuis qu’elle était petite, Jude avait toujours entretenu une relation de confiance avec sa mère mais c’était justement ça qui faisait le plus mal. Voir sa mère dépérir au fur et à mesure, perdre le goût de sortir, de rire, de parler et plus récemment de vivre. Pendant tous ces mois, la jeune femme s’était demandée comment elle allait réagir, une fois qu’elle serait partie. Elle s’y était préparée, elle le savait ; les médecins lui avaient dit qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps pourtant, elle avait mal, très mal. Elle se sentait seule, elle ne l’était pas non mais elle le sentait ou peut-être qu’elle voulait le sentir. Elle voulait en vouloir au monde entier pour ce qui lui arrivait. Elle n’appelait plus Lena, ni Epiphanie. Luke venait la voir de temps en temps et c’étaient les rares fois où elle trouvait le sourire. Bientôt trois mois que sa mère avait quitté ce monde et c’était aujourd’hui qu’elle avait enfin craqué. On disait souvent que la vérité finissait souvent par éclater à un moment ou un autre et que cette vérité faisait mal lorsque cela se produisait. Maintenant, Jude Loan le comprenait. Elle avait fait mine de se sentir bien, elle avait joué la comédie à la perfection, se dupant elle-même; mais la vérité venait de la frapper en plein visage. Elle n’allait pas bien, non elle n’allait pas bien. Elle se foutait que ces gens s’inquiétaient pour elle ou soient désolés. Elle avait perdu sa mère elle ! Le monde avait arrêté de vivre et les aiguilles de tourner. Jude se rendait compte qu’elle était loin d’ être passée à autre chose. Elle avait vingt-trois ans, elle était sans père, sans mère et son frère n’était qu’un simple idiot ! Un idiot qui avait refusé de voir sa mère à l’hôpital et qui tentait maintenant de comprendre ce qu’elle pouvait ressentir. Un frère qui n’avait pas fais le geste pour sa mère cancéreuse et pour sa sœur épuisée. 00h 15 indiquait le cadran de la voiture. Comment avait-elle réussit à conduire jusque devant l’immeuble ? La jeune femme ne se souvenait absolument pas. Elle savait qu’elle avait passé la journée à jouer sa comédie de jeune femme parfaitement heureuse puis avait pris un verre ou deux dans un bar non loin de la ville. Un verre ou deux ? Peut-être trois ? Cinq ou six ? Elle ne se souvenait plus exactement. Ce qu’elle savait c’est qu’elle se trouvait devant son immeuble alors qu’elle venait de conduire en état d’ébriété et que sa tête lui faisait atrocement mal. Sa tête qu’elle posa quelques instants sur la fenêtre froide du carreau . Il allait falloir qu’elle rentre en toute discrétion sans se faire remarquer et elle sentait que la tâche n’allait pas être évidente. Depuis la mort de sa mère, Trish la surveillait en attendant qu’elle finisse par craquer et Noah, son frère ne l’aidait pas à y voir clair. Parfois, elle en venait à regretter d’avoir accepter l’offre de son amie. Certes, elle avait eu besoin d’un logement en urgence mais elle aurait préféré vivre dans la rue plutôt que de devoir croiser cet imbécile de Noah vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Elle sentait qu’en plus de cela , il partageait sa pensée ! Elle faisait parfois – bon d’accord souvent- son mieux pour lui rendre la vie impossible. Prendre une douche et y rester des heures alors que ce dernier devait partir travailler, se réveiller avec les black eyed peas les matins où elle commençait tôt alors que lui bénéficiait –pour une fois – d’une grasse matinée. Bien sûr, il ne se laissait pas faire, et il faisait parfois pire. C’était simple entre eux c’était la guerre, ils ne s’appréciaient pas et ne se cachaient ni pour le montrer, ni pour le dire. Et même bourrée, Jude pouvait le confirmer. Il y avait des moments où elle aurait bien étranglé le jeune homme ! Il était tout ce qu’elle détestait : sûr de lui, coureur de jupons, et surtout immature à en mourir ! Même Jules avait cédé ! Son amie lui avait confié récemment qu’elle couchait avec lui régulièrement ! Jude avait cru rêver, elle avait eu envie de les étrangler et tous les deux ! D’après elle, Jules méritait mieux que lui et elle détestait l’idée de savoir que son amie s’attachait à lui. Était-ce la vraie raison ? Jude n’était-elle pas secrètement jalouse de son amie ? N’était-elle pas en réalité attirée par son impitoyable ennemi ? Il n’y avait qu’un pas entre l’amour et la haine. Tout comme il n’y avait qu’un pas entre la chaussée et sa voiture, qui pourtant lui paraissait être un gouffre. Elle descendit difficilement de sa voiture et après un quart d’heure, elle parvint à glisser ses clés au bon endroit dans la serrure. Premier obstacle atteint. Elle venait de surmonter la première difficulté, la deuxième serait de monter les escaliers. Elle n’avait jamais pris l’ascenseur et ne le prendrait jamais, elle était déjà restée coincée étant plus jeune et à part la perspective de retrouver de magnifiques pompiers dans quelques heures, elle ne voyait aucun intérêt de le reprendre. Elle entama donc sa montée du premier étage. Elle avait l’impression de monter pieds nus, tous les étages de la tour Eiffel alors qu’elle n’habitait seulement qu’au troisième. Finalement, elle arriva essoufflée à l’étage et se demanda pendant une fraction de seconde, quelle porte menait à son appartement. Il y en avait quatre. TROIS CHANCES SUR QUATRE DE SE TROMPER. La première pensée qui lui vint à l’esprit fut de savoir si son karma était plutôt bon. Elle eut la réponse assez rapidement d’ailleurs,sa mère était morte, elle avait du habiter chez une amie parce qu’elle n’avait plus d’appartement. KARMA N’ETAIT PAS SON AMIE. CETTE FILLE ETAIT UNE GARCE QUI LUI MENAIT LA VIE DURE, ON NE POUVAIT PAS COMPTER SUR ELLE. Maintenant, peut-être que la Karma changeait lorsque l’on était bourrée ? Lorsque l’on allait au pôle sud, l’eau tournait dans le sens inverse des aiguilles d’une montre non ? Peut-être que lorsqu on était bourrée, le karma lui changeait aussi de direction. Jude croisa les doigts et inséra ses clés dans la première porte. Manque de pot, ça ne rentrait pas. Frustrée et oubliant pendant une fraction de seconde que ce n’était pas la seule porte, elle insista mais non, la clé ne voulait absolument pas rentrer. Elle se dirigea alors vers la deuxième porte et elle se mit à chercher ses clés qui bien évidemment n’avaient pas changé de place et se trouvaient toujours dans sa main droite. Lorsqu’elle s’en rendit enfin compte, elle les inséra dans la serrure et miracle, la porte s’ouvrit. Tout était sombre dans le hall et elle décida de faire le moins de bruit possible. Elle enleva ses chaussures puis posa sa veste et ne manqua pas de faire tomber une pile de livres qui traînait par là. « CHUUUUUUUUUUT ! » s’exit-elle en s’adressant à la fameuse pile. Et alors qu’elle se retournait de nouveau vers le salon après avoir tout ramassé, elle tomba nez à nez avec Noah.

«Diminue d’un ton s’il te plaît, tu me fais mal à la tête » Je souris. Si j'avais été un tant soit peu humain, je l'aurais laissée aller se coucher sans la faire chier. Mais c'était une occasion en or de me venger. Elle ne se gênait pas pour m'embêter dans les pires moments alors ne le ferais-je pas ? Combien de fois étais-je arrivé en retard au cabinet par sa faute ? Je ne les comptais plus de toute façon et j'y étais habitué. Alors je comptais bien la faire souffrir ce soir. Et de toute façon, elle se vengera demain matin sans aucun remord - si elle s'en souvient vu son état. Je la suivis alors qu'elle allait se verser un verre d'eau et se chercher quelque chose dans le frigo. « C'est parce que t'aurais dis oui que je t'ai pas invité Hoxley. » Aoutch ! Ca faisait mal mais pas question de me laisser démonter par une petite phrase comme celle-là. « N'en sois pas si sûre poupée. J'ai mieux à faire que te regarder boire et parler à ton reflet. » Elle sortit un yaourt du frigo qui n'avait pas l'air très récent mais elle ne sembla pas le remarquer. De toute façon, elle sera malade demain qu'elle le mange ou non. Elle n'avait pas l'air d'avoir les yeux dans les trous mais elle réussit quand même à trouver le tiroir à couverts et à en sortir une cuiller. « Et toi ? Tu es encore debout ? Je te demande pas de m’attendre tu sais ? Tu te fais du mal tout seul. » Elle m'avait percé à jour mais ce n'était pas un problème. Elle était bourrée et je n'aurais aucun problème pour lui faire croire ce que je veux. « Ne te prends pas tes rêves pour des réalités chérie. Je travaillais figures-toi pendant que tu étais en train de t'amuser comme une folle avec ton verre d'alcool. » Elle alla s'assoir dans le canapé sans se déranger de virer mes affaires par terre. J'ignorais ce fait et je la suivis dans le salon pour voir qu'elle ne s'était pas gênée pour occuper tout le canapé. « écoute, j’ai pas envie de me battre ce soir. » Dommage pour elle ! Moi, j'étais en forme et j'allais me venger pour la dernière fois où elle m'avait fait chier qui ne devait pas dater de bien longtemps. Je m'assis sur ses jambes vu qu'elle ne voulait pas me laisser de place. Ça ne semblait pas lui plaire mais tant pis pour elle. Elle soupira et je souris. Je savais bien qu'elle en avait marre de moi mais ça m'amusait énormément de l'énerver. Je la vis se pencher vers mes papiers et en attraper un. « A ta place, je laisserais mes papiers. J'en ai besoin pour le boulot. » J'attrapais la télécommande sur la table en prenant bien soin de bien appuyer sur ses jambes pour qu'elle les pousse. Ça avait beau être bien pour l'embêter, le canapé était plus confortable. J'allumais la télé sur une chaîne au hasard et je montais bien le son. « Ah tiens, ils passent Saw 4. On regarde ? » Je souris. Ce film était l'idéal pour la rendre encore plus malade et je savais qu'elle n'aimait déjà pas le gore en étant sobre. Alors imaginez bourrée... Ça risque de devenir amusant. Mais elle peut toujours courir pour que je lui tienne les cheveux pendant qu'elle vomit.

Jude était une enfant, elle n’avait jamais réellement grandi et tout ceux qui la connaissaient pouvaient le confirmer. Quand elle était petite, elle trouvait toujours le moyen de s’en prendre à toute sa famille et cela n’avait pas changé en grandissant. Son enfance, c’était une des plus belles périodes de sa vie. Ça devait m’être pour tout le monde, lorsque l’on était petits on ne se souciait de rien. Tout était plus simple, pas de rupture amoureuse, juste le passage d’un amoureux à un autre, pas d’amitié déchue, juste une dispute passagère pour savoir qui allait jouer la princesse, pas de mère décédée, pas de frère égoïste, pas de problèmes d’argent et pas de colocataire encombrant. L’enfance c’était peut-être une des rares périodes de la vie où l’Homme pouvait agir à sa guise sans se soucier des autres. C’était pour cela que Peter Pan avait toujours été le dessin animé de Jude. Elle avait toujours imaginé que ce dernier viendrait la chercher et qu’elle passerait des années merveilleuses à ne se soucier de rien comme les enfants du pays imaginaire. Cependant, la réalité de la vie l’avait rattrapée et alors qu’elle avait décidé de rester enfant, elle avait apprit que ce n’était pas à elle de se décider sur ce genre de choses. On aurait pu penser qu’elle avait grandit, qu’elle était devenue adulte par obligation. Après tout, sa mère avait eu le cancer et Jude avait du renoncer à ses rêves d’enfant. Il avait fallu affronter les réels problèmes de la vie quotidienne. Ceux que l’on ne montrait pas assez aux enfants de nos jours. Pourtant c’était à cause de ces problèmes que Jude s’était raccrochée à cette part d’elle, celle qui aimait profiter de la vie à temps plein. Celle qui s’amusait à coincer des sauts d’eaux au dessus des coins de portes, celles qui faisait encore des blagues au téléphone en choisissant un numéro au hasard dans l’annuaire, celle qui riait encore lorsqu’on lui proposait une bonne bataille d’eau, de sucre ou de farine !

Alors bien évidemment, si Noah lui demandait de lâcher la feuille, elle n’allait pas la lâcher. Elle la ramassa et y jeta un rapide coup d’œil, ça grouillait de chiffres et de mots incompréhensibles. En temps normal, ça lui donnait un mal de chiens mais maintenant elle avait carrément l’impression de voir tous ces chiffres bouger sur la feuille pour lui jouer des tours. Mais malheureusement pour Noah, il venait d’avouer sa faiblesse : « A ta place, je laisserais mes papiers. J'en ai besoin pour le boulot. ». Si c’était important pour Noah, c’était parfait pour Jude. Même si cette feuille lui donnait le tournis, elle allait la garder précieusement avec elle juste parce que cela faisait flipper Noah et elle le voyait bien. Elle était bien décidée à ne pas se laisser faire , même à une heure du matin et même relativement bourrée. Elle vit le jeune homme attraper la télécommande pour changer de chaîne, elle sentait qu’il préparait quelque chose et cela se confirma lorsqu’elle leva les yeux sur l’écran puis sur la tête réjouie de Noah. « Ah tiens, ils passent Saw 4. On regarde ? » demanda-t-il naïvement en souriant. Elle le poussa avec ses pieds jusqu’au fond du canapé puis voyant que cela ne menait à rien, elle soupira une nouvelle fois et se remit - non sans le tournis- en position assise. « Noah, ils passent un nouveau Porno sur HOTPURN, c’est pas mieux pour toi ça ? » demanda-t-elle en souriant. « A moins que tu aies trouvé quelqu’un que tu arrives à satisfaire ? Avec laquelle de mes amies tu n’as pas couché déjà ? Jules. Ah non c’est fait ça. Lena ? Merde, fait aussi. Épiphanie ? Merde, ça aussi ! » s’exclama-elle. Elle se leva quelques secondes, pour enlever son gilet et le déposer sur une chaise qui traînait par là et lorsqu’elle revint sur le canapé, elle vit que Noah s’était encore plus étalé, de manière à ce qu’il ne reste aucune place. Elle réfléchit quelques secondes, ou plutôt quelques minutes puisque son cerveau avait du mal à suivre les manigances de Noah puis elle finit par dire : « Comme tu voudras » avant de tirer sur la longueur de sa robe pour vérifier qu’elle était correctement mise et de s’asseoir sur les genoux de Noah. HAHA ça c’était un point pour elle, il avait beau faire tout ce qu’il voulait, elle remportait la première manche. Mais malgré cela, elle était loin d’en avoir fini, maintenant qu’il avait commencé, elle avait encore des centaines d’idées pour le faire tourner en bourrique. Elle se pencha tout en appuyant sur ses genoux et prit le yaourt qu’elle avait posé un peu plus tôt. Puis, avec un geste très délicat (ironie bien évidemment) et en jouant une comédie grossière, elle renversa son yaourt sur l’intégralité de son t-shirt. « Oh excuse-moi ! Ce que je peux être maladroite, c’est fou ! Je suis TELLEMENT désolée si tu savais » fit-elle plaintive et souriante en même temps. Bien sûr c’était faux, elle était loin d’êt désolée. Elle aurait presque pu le faire à la petite cuillère sur son t-shirt qu’elle n’en aurait pas été désolée. Elle était ravie, non en fait elle jubilait surtout maintenant qu’elle voyait qu’il commençait à être embêté par la chose. Jude aurait pu s’arrêter là, il était vrai mais elle était loin d’avoir fini son petit jeu, elle commençait tout juste à y prendre goût. Elle se mit à essuyer le t-shirt de Noah en feignant de vouloir l’aider alors qu’en prenant le bas de son t-shirt pour en essuyer le haut, elle faisait quatre fois plus de dégâts que si elle n’y avait pas touché. Elle frottait comme une acharnée, innocemment en espérant l’agacer en encore plus. Puis une idée de génie lui vint à l’esprit, elle attrapa la feuille de compte qu’elle avait gardé et se mit à essuyer le désastre avec. Noah réagit enfin, trop c’était trop.

Edit d'épi : fais attention jude, les feuilles du boulot c'est aussi les miennes, je ne veux pas me retrouver à la rue parce qu'à cause de toi on a paumé un truc important

La première fois que j'avais vue Jude, elle avait été une fille comme une autre à mes yeux. Je l'avais draguée, elle m'avait repoussée. Bon ça n'arrivait pas souvent que je me fasse jeter mais elle était restée une fille banale. Du moins, elle l'est restée jusqu'au soir. C'est ce soir-là qu'elle a commencé à me détester. Tout ça parce que je venais coucher avec son amie. Elle m'avait jugé au premier abord et avait décider de me haïr. Bon sa première impression était sûrement la bonne mais c'est pas pour autant qu'elle ne doit pas changer son jugement. Certes, je ne lui ais pas vraiment donné de raisons de me voir autrement depuis qu'elle a emménagé avec ma sœur et moi. Mais c'est elle qui a commencé ! Je sais, ça peut paraître un peu gamin mais si je ne riposte pas, je n'ai pas de vengeance. Alors tant qu'elle n'arrête pas, je n'arrêtes pas. C'est comme ça et je dois avouer que je prends beaucoup de plaisir à ce jeu qui s'est instauré entre nous. Il faut sans arrêt innover pour la rendre encore plus folle que la fois d'avant. C'est un travail à temps complet de faire chier Jude. A se demander comment je peux avoir un boulot à côté ?

Malgré que je lui ai demandé ma feuille, elle ne me la donna bien évidemment pas. Je ne savais même pas pourquoi je l'avais demandée puisque ça n'allait qu'empirer les choses. Mais en fait ce papier n'était pas si important. Enfin si mais je l'avais en double et scanné sur mon ordinateur. Je savais très bien qu'un truc important pour moi ne restait jamais longtemps vivant avec Jude dans les parages. Je commençais à la connaître et à prévoir ses coups. Je savais très bien que ça allait l'énerver mais ce n'en était que plus amusant. Je faisais donc semblant de me préoccuper de cette feuille avant d'allumer la télé. Elle sembla réaliser que sa position n'était pas confortable car elle bougea pour s'asseoir normalement. Je m'installais plus confortablement dans le canapé, ravi qu'elle ait cédé. « Noah, ils passent un nouveau Porno sur HOTPURN, c’est pas mieux pour toi ça ? A moins que tu aies trouvé quelqu’un que tu arrives à satisfaire ? Avec laquelle de mes amies tu n’as pas couché déjà ? Jules. Ah non c’est fait ça. Lena ? Merde, fait aussi. Épiphanie ? Merde, ça aussi ! » Je pouffais. Elle n'avait trouvé qu'à critiquer ses amies pour m'embeter. Elle généralisait trop de toute façon. « Franchement, je n'ai pas besoin de pornos Jude. Ma vie, c'est la même chose mais avec des dialogues plus réalistes. » Je souris en me demandant comment ça serait avec elle. Je chassais rapidement cette idée de mon esprit. « Et pour ta gouverne, j'ai couché avec Jules et Lena avant de te connaitre. Pour Epi, d'accord, c'était après. mais sache qu'il n'y a pas qu'elles. Tu connais les voisines, Elea et Daph ? Fait aussi ! Bon je vais pas te faire une liste, ça serait trop long... Tu veux ajouter ton nom à la liste ? » Elle se leva pour enlever son gilet et j'en profitais pour étaler les jambes comme elle l'avait fait quelques minutes auparavant. Comme moi, elle s'assit sur mes jambes mais ce n'était pas la même chose. Elle était tellement légère que l'avoir sur les genoux ou pas ne changerait rien. Elle prit alors son yaourt et dans un geste voulu incontrôlé, le renversa sur moi. « Oh excuse-moi ! Ce que je peux être maladroite, c’est fou ! Je suis TELLEMENT désolée si tu savais » Je ne disais rien. Ce n'était que du yaourt - certes un peu périmé - et ça partirait facilement au lavage. Elle avait déjà fait pire qua ça. Mais elle ne s'arrêta pas là et commença à essuyer - ou plutôt à étaler. Elle augmentait les dégâts mais le temps que je décide d'agir parce que ça m'enervait, elle prit la feuille qu'elle avait dans les mains -ma feuille- et commença à essuyer avec. J'attrapais ses mains pour les repousser. « Arrêtes putain Jude ! Il faut pas abimer ce papier ! » Je pouffais et relâcher ses mains. « Ahah ! En fait, je m'en fiche de ce papier. Je l'ai en double alors tu peux en faire ce que tu veux. » Je souris devant son air dépité et je fis un mouvement brusque des jambes. Elle tomba à la renverse sans avoir le temps de se rattraper et je m'arrangeais pour qu'elle ne se cogne pas contre la table. Bah oui, j'avais beau avoir envie de lui faire mal, je ne voulais pas l'emmener à l'hôpital. Je me baissais vers elle en souriant. « Désolé, un faux mouvement. » Je levais alors les yeux vers la télé. « Oh un bisounours ! » Elle se tourna vers la télé comme une enfant fan de dessin animé et réalisa que c'était toujours Saw. « Ah non en fait ! C'était les tripes du monsieur qui me faisaient penser à un nounours ! »

Lorsqu’elle était morte, le monde avait cessé de tourner et jusqu’à aujourd’hui il n’avait pas repris son activité. Chaque jour pour Jude était comme un songe. Elle ne vivait pas vraiment. Elle survivait. Il n’avait fallu que deux minutes au monde, au destin, à Dieu ou à toute personne qui régissait cette planète pour lui retirer sa mère. Pour lui retirer la seule personne qui avait consisté un équilibre pour elle pendant de longues années. Tout allait si vite, elle se tenait à vos côtés un instant, cette personne que vous aimiez de tout votre être, plus que vous-même et au moindre battement de cils c’était fini. Le matin même, elle avait discuté avec elle de sa vie amoureuse chaotique, elle était revenue la voir plusieurs fois dans la journée pendant son service et lorsqu’elle était sortie d’une longue opération assez éprouvante le soir, l’hôpital était resté le même, en activité et en mouvement, son bip continuait de sonner, la chambre de sa mère n’avait pas changé. La seule différence était que sa mère ne s’y trouvait plus. Il avait fallu quatre heures de chirurgie pour qu’elle disparaisse complètement. Et non, elle ne lui avait pas dis au revoir, elle n’avait pas été préparée. Elle était arrivée et avait vu la chambre vide, et le médecin en sortir, retirant le dossier de la porte. Oui, son chef n’avait rien trouvé de mieux à dire que : « Je suis désolé ». Mais était-il vraiment désolé ? Savait-il réellement ce que cela faisait de perdre quelqu’un que nous avions aimé pendant autant de temps ? Savait-il le vide que cela avait crée dans sa poitrine ? Ce vide qui malgré tous les efforts ne se rebouchait jamais et qu’elle sentait la nuit, plus profond que jamais. Ce vide en constante activité qui la narguait, qui lui faisait mal et qui lui donnait parfois l’envie de se couper en deux pour ne plus rien ressentir. « Je suis désolée » avec la plus grande conviction permettait-il de se sentir mieux ? I am Sorry, Entsculdigung permettait-il de vous donner une nouvelle raison de vous lever le matin. Non. Parce que même si le temps panse les blessures et les rend moins vives, le cœur lui, ne les oublie pas. Le moindre geste, le moindre son, le moindre regard rappelait à Jude que sa mère lui manquait. Dans une seule journée, il y avait l’odeur de sa lessive. Malgré la douleur, elle avait décidé de garder la même que celle que sa mère utilisait auparavant. Il y avait également ses journées à l’hôpital qui paraissaient moins chargées, puisqu’elle ne devait plus aller la voir mais qui lui paraissait plus ennuyeuses. Il y avait le fait que lorsqu’elle rentrait chez elle, elle se sentait encore plus seule que jamais. Il y avait le courrier qui continuait à affluer pour s mère dans sa boite aux lettres, même si elle soupçonnait Noah et Trish de les retirer avant qu’elle ne les voit. Enfin, il y avait son reflet dans le miroir qui lui rappelait souvent sa mère. Ces cheveux qu’elle avait souvent eu envie de couper ces derniers mois parce qu’ils lui rappelaient des souvenirs encore bien trop frais. Oui, pour Jude chaque journée était un combat. Un combat contre la mort, un combat pour la vie, un combat pour elle-même. Et alors qu’elle évitait ces journées au maximum, il arrivait que chaque petit évènement, aussi excentrique soit-il, lui rappelle sa mère. Comme ici, le simple fait de vomir qui lui avait rappelé la manière dont sa mère avait l’habitude de lui tenir les cheveux et de rester avec elle dans son lit ensuite.

Jude était bien trop fière pour pleurer devant les autres. Elle souriait, elle riait, elle se cachait derrière des rires, derrière des situations étranges et derrière des colères inutiles. Lorsqu’on croisait la jeune femme dans la rue, on pouvait penser : « elle déborde de joie, de vie, de bonne humeur. Elle est à l’image de son temps. » . Jude ne pleurait jamais devant les autres, juste pour elle parfois. Elle ne noyait que très rarement son chagrin dans l’alcool, à ce jour c’était exceptionnel. En temps normal, la joie était l’ivresse de Jude. Sourire pour mieux périr. Epiphanie ne l’avait jamais vu pleurer, Lena l’avait peut-être vu une seule fois et Luke un peu plus encore. Rares étaient ces personnes qui obtenaient ce privilège, cette confiance, qui voyaient Jude dans l’éclat de son mal-être. Alors évidemment, le fait que Noah entre et la voit dans un tel état de la rassurait pas et ne faisait qu’augmenter sa rancune envers lui. Elle avait besoin de tout sauf d’entendre ces moqueries à cet instant. Elle avait beau paraître forte, ici elle était des plus vulnérable. Malgré ces menaces, elle constata avec mépris qu’il s’était tout de même décidé à franchir le seuil de la porte et qu’il la regardait assez ébahi. « Sort Noah. J’ai pas la tête à ça. » dit-elle doucement mais avec force. « S’il-te-plaît. » finit-elle. S’il ne voulait pas sortir par la force, peut-être comprendrait-il avec la politesse ? Elle ne l’était pas souvent avec lui donc peut-être comprendrait-il le déclic ? Apparemment non, il avance, tira la chasse d’eau et ferma la cuvette. Il la souleva et elle se laissa également faire lorsqu’il lui passa un gant sur le visage. Elle lui en voulait d’être aussi gentil parce qu’elle ne pouvait pas lui crier dessus et passer ses nerfs sur lui, comme elle le faisait si bien d’avantage. Noah était une bonne thérapie en effet, elle rejetait sur lui sa souffrance sous forme de jalousie, d’insultes et elle se sentait mieux ensuite. Là, elle était beaucoup trop mal pour essayer quoique ce soit. Elle avait juste envie d’évacuer cette souffrance par les larmes. Un moyen sain et efficace. Pleurer, pleurer et se vider l’esprit et le corps de tout deuil. Elle posa sa tête contre son torse et continua de plus belle. Elle se sentait tellement seule et voilà qu’à présent, elle se blottissait contre Noah ! Il allait lui falloir trouver toutes les insultes possibles pour lui faire oublier ce moment embarrassant. « Chut... ça va aller Jude... je suis là. » dit-il en posant le gant et en passant ses bras autour d’elle comme pour étouffer ses pleurs. « Elle est morte Noah. Elle est partie. Elle était là, j’ai battu des cils et elle n’était plus là.. » pleura-t-elle. « Elle m’a laissé toute seule. Je suis toute seule et j’ai mal.  J’ai si mal. ». Elle haletait et et repartait de plus belle. Elle ne s’était jamais confiée ainsi. « Je l’aimais si fort. ». Noah ne disait rien, contrairement à ce qu’elle avait pu penser au départ, il la laissait se décharger de son mal-être et l’encourageai de temps en temps en resserrant son étreinte. Il lui murmura à l’oreille : « Je comprends... tu peux pleurer autant que tu veux, tu peux même pleurer plus... ». En temps normal, elle aurait ris ou elle se serait enfuie en courant plutôt que d’écouter ce qu’il venait de lui dire mais à cet instant, elle voulait juste tout oublier. Et pleurer. «  Elle est partie. » répéta-t-elle toujours en pleurant.

Elle avait pleuré pendant vingt minutes. Elle se sentait vide, prête à repartir sur du neuf. Elle était toujours posée contre Noah et essayait de se calmer. Elle était calme en fait, complètement sereine. Comme si elle venait d’exploser une barrière et qu’elle pouvait continuer à faire exploser toutes les autres. « Quand j’étais jeune et que je rentrais bourrée, elle venait tenir mes cheveux dans les toilettes, puis elle me consolait jusqu’à ce que j’aille mieux. » lui dit-elle alors avec calme. C’était la première parole qu’elle disait sans pleurer. Avant même qu’il puisse répondre elle se remit à parler : « c’était une femme bien. Elle pensait toujours aux autres d’abord, puis ensuite à elle-même. Elle respirait la bonté et la générosité. ». Elle se retourna ensuite vers Noah qui avait la tête contre la baignoire, elle s’attacha les cheveux et se mit à le frapper. Très fort. A tous les endroits accessibles à sa portée. « Je t’avais dis de ne pas entrer Hoxley il me semble ! » cria-t-elle « T’a de la chance que je ne veuille plus vomir. Ton lit est déjà bien rempli de toute façon. ». Elle pointa ensuite son doigt contre son torse en s’exclamant : « pas un mot de ça, à quiconque ok ? ». Elle essayait de se donner une contenance mais elle avait vraiment peur qu’il l’ébruite. Elle ne voulait pas inquiéter ses amis et elle préférait garder ça pour elle. Elle se relava et descendit sa robe dans un sale état puis se dirigea vers le lavabo : « Oh ! Et la prochaine fois que tu veux m’aider, essayes de le faire bien tu veux ? ». Elle prit sa brosse à dents et sa serviette et fit signe à Noah de sortir. Alors qu’il arrivait devant la porte, elle lui dit : « la prochaine fois que tu as envie de parler, va voir un psy. » . Elle savait qu’il n’allait pas relever, elle le faisait pour se redonner une constance. Elle venait de lui montrer une de ses faiblesses et elle se jura intérieurement que cela ne se reproduirait plus puis elle ferma la porte à clé.

Je n'avais pas l'habitude des filles en pleurs dans ma salle de bain. Bien sûr, j'avais déjà dû régler des crises avec Trish mais ça n'allait jamais aussi loin que ça. Trish avait déjà eu ses chagrins d'amour et j'étais souvent le seul à pouvoir la calmer. Je ne savais pas pourquoi, tout ce que je savais c'est qu'elle envoyait chier mes parents et qu'elle me parlait à moi. Du coup, je savais exactement ce qu'il fallait faire quand une fille était en larme. Bien sûr, elles étaient toutes différentes dans ces cas-là. Mais en général, elles cherchaient du réconfort et surtout pas un homme qui profite de leur faiblesse. Et ce rôle, je savais très bien l'assumer. Jude avait beau me détester - du moins le prétendre-, elle avait besoin d'aide et j'étais seul avec elle. Alors je m'occupais d'elle comme je le faisais avec Trish. Je la prenais dans mes bras et je tentais de la calmer. « Elle est morte Noah. Elle est partie. Elle était là, j’ai battu des cils et elle n’était plus là.. » Entre deux sanglots, elle réussit à me parler. Je me doutais bien que ce ne devait pas être facile pour elle d'en parler surtout avec moi mais c'était bien qu'elle réussisse à en parler. « Elle m’a laissé toute seule. Je suis toute seule et j’ai mal. J’ai si mal. Je l’aimais si fort. » Caressant ses cheveux, je ne disais rien sauf quelques paroles réconfortantes. « Elle est partie. » Je la laissais parler, se décharger de ce qu'elle avait sur le coeur. Je ne sais pas combien de temps ça dura mais ça sembla lui faire du bien de se confier. Je me doutais qu'elle risquerait de m'en vouloir demain matin juste parce que je l'aurais vue aussi faible mais ça valait le coup pour l'aider. « Quand j’étais jeune et que je rentrais bourrée, elle venait tenir mes cheveux dans les toilettes, puis elle me consolait jusqu’à ce que j’aille mieux. » Elle avait cessé de pleurer au fur et à mesure et il semblait que c'était fini maintenant. « c’était une femme bien. Elle pensait toujours aux autres d’abord, puis ensuite à elle-même. Elle respirait la bonté et la générosité. » Je ne la connaissais pas sous ce jour. En même temps, mes seules conversations avec elle étaient des disputes. C'était difficile d'apprendre des choses sur elle en lui envoyant des crasses, en la réveillant à cinq heures du matin et en la faisant tomber de sa chaise. Il fallait qu'elle soit bourrée et en pleurs dans la salle de bain pour que je connaisse plus que ce petit côté prétendant et surtout chiant de sa personnalité.
Tout à coup, sans que je sente rien venir, elle se retourna vers moi et commença à me frapper. Je n'y comprenais plus rien et je me reculais du mieux que je pouvais vu que j'étais déjà contre la baignoire. Non pas qu'elle faisait mal mais autant qu'elle ne se blesse pas avec ses petits points. « Je t’avais dis de ne pas entrer Hoxley il me semble ! T’a de la chance que je ne veuille plus vomir. Ton lit est déjà bien rempli de toute façon. »Ah oui mon lit ! J'avais complètement oublié ce problème. Je n'eus pas le temps de répondre qu'elle me faisait déjà des menaces. « pas un mot de ça, à quiconque ok ? » Elle voulait la jouer comme ça ? Pas de problème, j'avais maintenant un moyen de chantage contre elle. J'étais quand même perturbé de ce changement d'attitude si soudain. Ca faisait presque peur comment elle était passée d'un état lamentable à l'énervement. Elle venait sûrement de réaliser qu'elle venait de raconter ses malheurs à la dernière personne à qui elle aurait dû le dire. « Tu me connais, je suis une tombe... enfin, ça dépendra de ce que tu m'offres. Je vais réfléchir à ce que je pourrais te demander. » Je souris pendant qu'elle se relevait en essayant -je dis bien essayant - de rester digne. Je me relevais après elle, un peu engourdi d'être resté dans la même position aussi longtemps. « Oh ! Et la prochaine fois que tu veux m’aider, essayes de le faire bien tu veux ? » Je soupirais. Je savais très bien ce qu'elle faisait, elle essayait de se montrer forte pour faire comme si elle n'était pas en larme deux minutes plus tôt mais ça ne marchait pas avec moi. Je savais très bien que derrière ces paroles acerbes se cachait un coeur pas si glacé. Elle me fit signe de sortir et contrairement à mon envie de l'engueuler sur sa façon d'agir, je le fis. J'étais trop fatigué pour ça. Je n'avais qu'une envie et c'était de m'écrouler et de dormir. « la prochaine fois que tu as envie de parler, va voir un psy. » Je levais les yeux au ciel et je sortis. Je restais devant la porte pendant qu'elle la claquait et la fermait à clé. Oubliant ce qui s'était passé plus tôt, je me dirigeais vers ma chambre en enlevant mon t-shirt. Mais l'odeur me rappela rapidement les évènements. Qu'à cela ne tienne, je fermais la porte et me dirigeais vers la chambre de Jude. Un lit simple. Pas grave, elle pourrait dormir par terre si elle le voulait. Ou bien venir se coller à moi. ( ). J'enlevais mon pantalon et mes chaussettes et je me calais sous la couette. Une fois installé, je retirais mon boxer et le lançais sur le sol. Puis j'entrepris de fouiller la table de nuit de Jude le temps qu'elle revienne. Je tombais sur un objet pas très catholique et je pouffais tout seul. Elle en était donc rendue à ce genre de procédé pour avoir du plaisir ? Je l'entendis alors arriver dans la chambre et je pointais l'objet vers elle. « Tu sais, il en existe des vrais et c'est vachement plus efficace. Si tu veux, je te propose mes services, j'en ai un sous ta couette. » Je souris en levant un sourcil. « Ton lit est confortable pour la peau nue. T'as bien fait de vomir dans le mien, je crois que je vais rester dans celui-là tant que tu n'auras pas lavé le mien. »