ALL YOU NEED IS LOVE POUM POUM POUM ✦Ca, c'est ma soeur. On a toujours été très proches. Je l'adore, mais Dieu ce qu'elle peut être chiante. Déjà petite, Lila faisait absolument tout pour m'emmerder au possible. « Swann, s'il te plaît, viens jouer à la poupée avec moi ! Tu feras le méchant papa. » « Pas aujourd'hui Lila, j'ai mon nouveau ActionMan et je suis trop à fond dedans ! » On était pourtant pas dans la même chambre mais un objet traversa tout le couloir pour se heurter violemment contre ma tête. Et paf, une poupée Barbie dans la gueule. Comme je vous le disais : adorable, cette enfant. Parfois, quand elle m'énervait de trop, je lui rendais la pareille, je lui balançais un truc et puis ça n'en finissait plus. On se levait, on courait l'un vers l'autre, on se battait comme des bons à rien. Je lui tirais les cheveux et elle enfonçait ses doigts dans mon nez. Que voulez-vous, à neuf ans, on a pas encore acquis l'art de se battre. Quelque part, je suppose qu'on aimait ça. C'était notre façon de se dire qu'on s'aimait. Mais ça ne s'arrêtait souvent pas là. Lorsque les parents étaient de sortie, nous n'avions qu'à enfermer la nounou dans le jardin pour avoir la maison à nous seuls. Alors on courrait partout, on se lançait des insultes à la figure, et il arrivait que ça dégénère. On se disputait souvent, mais c'était plus drôle qu'autre chose, on savait que l'un n'en voudrait pas à l'autre, ou tout du moins pas pour longtemps. « De toute façon, t'es qu'une patate pas fraiche ! » « Et bah... et toi, t'es qu'un concombre déformé ! » « Sale poulpe dégarni ! » « Haha, ça existe même pas, les poulpes ! » « Ah ouais ? On va voir si ça existe pas ! » Lila était déjà bien coriace, elle attrapa une assiette qu'elle lança au travers de la pièce. Inutile de dire que j'ai juste eu le temps de me baisser et de me retourner vivement pour regarder la pauvre malheureuse terminer sa course quelques pas plus loin, brisée contre un mur. Le pire, c'était qu'elle éclatait toujours de rire cette imbécile, et il ne me fallait pas longtemps pour en faire autant. On courait autour de la table, tirant sur la nappe, faisant grincer les chaises. La nounou, elle, elle était plus au bord de la crise cardiaque qu'autre chose. Elle nous regardait, effrayée, tapant de toutes ses forces contre le carreau du jardin. Et nous, on riait, simplement. La plupart des baby-sitters qui nous étaient attribuées perdaient leur emploi de cette façon. Lila n'avait qu'à se mettre à pleurer, et moi je devais juste aller la consoler pour que nos parents tombent toujours dans le piège. Il fallait dire que le peu de fois où ils étaient présents, cela ne suffisait pas pour apprendre à connaître leurs enfants. Il fallait dire que Lila ne faisait rien pour arranger la chose, elle grandissait et elle tâchait toujours de dépasser ses limites. Et moi, j'entrais tout bêtement dans son jeu, je lui rendais sa monnaie. Mais j'aimais ça. Un jour, ils avaient même oublié notre anniversaire, ils étaient restés bloqués en Floride, pour des vacances improvisées, sans nous évidemment. Nous étions de faux-jumeaux, alors nous fêtions chaque année notre anniversaire ensemble. Tout le monde était présent, c'était pour nos seize ans. On a fait comme à notre habitude : on a improvisé. Je discutais avec elle. Sasha. Notre magnifique voisine et ma meilleure amie. Nous étions en train de parler, lorsque Lila est arrivée, souriante, avec son air d'ange. Ça ne présageait rien de bon. « T'en fais pas Sasha, mon frère ne tentera rien avec toi, il est gay. Un peu comme ton père, en fait. » « Putin Lila, tu peux pas la fermer ? » « Mon père n'est pas gay, Lila. Et ton frère non plus d'ailleurs, regarde. » Je pense que si elle m'a embrassée ce soir-là, c'était plus par défi que par autre chose, mais pour moi ça voulait dire tellement plus. Au fond, je savais que pour elle aussi, tout du moins je l'espérais. Lila était repartie avec son sourire amer, et c'est à partir de là que tout a dérapé. Lila n'a plus jamais été la même. Elle a tellement changé. Elle découchait souvent, s'habillait vulgairement et changeait de mec plus vite qu'il ne m'arrivait d'être collé au lycée. Et c'était peu dire, croyez-moi. Elle était devenue si étrange. J'aurais tout fait pour elle, mais elle allait trop loin. J'étais le seul à veiller sur elle, parce que nos parents étaient plus ailleurs que chez nous, mais je n'arrivais pas à la raisonner. Un soir, on s'est disputé comme jamais, et elle est partie, elle a juste déménagé. Comme ça. On était encore au lycée. J'ai appris qu'elle vivait chez son mec du moment, cet espèce de drogué qui sautait sur tout ce qui bouge. Bien, qu'il en soit ainsi. Mais qu'elle ne revienne jamais demander après moi, cette petite garce. Les années passèrent et je déménageais à Boston, je n'ai plus jamais eu de nouvelles de Lila. Un soir, j'ai reçu un coup de téléphone, elle était en pleurs, elle me suppliait de revenir la chercher en Europe. Qu'elle s'était mise dans de sales draps, qu'elle avait des problèmes. Qu'il lui voulait du mal. Comment ça, un mec s'en prenait à ma sœur ? Ni une ni deux, je saute dans le premier avion. Je sais qu'elle a pu me faire des crasses pas possible, mais c'est ma sœur. Je l'ai dit, je tuerais le premier qui la touche. Et lorsque j'arrive à l'adresse qu'elle m'a donné, je crois que je n'ai jamais autant regretté de ne pas avoir plus essayé de la sortir de cette galère dans laquelle elle s'était fourrée depuis qu'on était au lycée. Pas de bol, c'est son mec qui m'ouvre. Plutôt baraqué, comme mec. Enfin, ça ne m'empêche pas de lui coller la plus belle droite de toute ma vie - j'en étais fier, de celle-là. « Lila ? Lila, t'es où ? » Je sens la panique s'emparer de moi et pourtant je ne cède pas. J'avance, le plus vite possible avant que le mec super balèze ne se relève pour me faire la leçon de ma vie, puis j'arrive enfin dans une chambre. Et là, Lila, ma Lila, je la vois en larmes, repliée sur elle-même dans un coin sombre de la pièce. Elle a des hématomes partout. Je vais le buter. Je l'aide à se relever et là, oh Dieu, qu'est-ce que je vois ? Est-ce qu'elle pèse désormais 90 kilos ? Naaan, elle n'est tout de même pas... Enceinte ? On règlera cette histoire plus tard, à ce moment tout ce qui m'importait c'était de la sortir de là. A peine je me retourne vers la sortie, que son mec se trouve juste dans l'encadrement de la porte, une arme à la main. Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit, juste de placer Lila derrière moi, et j'entends le coup partir. Finalement, je lui réglerais son compte plus tard, à ce cinglé. Est-ce que je viens vraiment de prendre une balle pour ma sœur ? Bon d'accord, j'ai survécu, et maintenant tout ce qu'il me reste c'est une petite cicatrice circulaire à l'épaule, mais après ça, elle a plutôt intérêt à ne plus jamais se mettre dans des galères pareilles. D'ailleurs ça ne risque plus d'arriver car je l'ai emmenée à Boston avec moi. Jamais je ne l'aurais laissée seule après ça, et qu'elle soit d'accord ou pas ça aurait été la même chose. Quant à cette histoire de bébé, elle ne me plaît pas du tout, hélas je ne peux plus rien y faire à part l'aider à élever son mioche.

Extrait tiré de ma présentation, je pense qu'il décrit parfaitement le lien que j'imagine.