i'll be there for you when the rain starts to pour

J'ai toujours aimé les contes de fées, les happy-ending, même si je ne pensais pas y avoir droit un jour, je ne pensais pas le mériter sûrement. Il faut dire que mes parents ne m'ont guère donné l'exemple. En tant que fille unique, ils ont toujours pensé me protéger en m'épargnant les détails de leurs multiples disputes, en me donnant des excuses bidons quand je demandai pourquoi Papa tenait la main de cette fausse blonde, pourquoi Maman s'énervait à cause d'une histoire de rouge à lèvres. Mais en grandissant j'ai bien vite compris de quoi il s'agissait. Mon père allait voir ailleurs sans gêne, et ma mère trop soucieuse des apparences préférait faire comme si de rien n'était. Elle pensait ainsi tout avoir sous contrôle, ne pas maîtriser quelque chose était pour elle insupportable. Je pense qu'elle a seulement commencé à réaliser qu'elle ne pouvait pas tout contrôler lorsque j'ai dû quitter le domicile familial pour l'université. C'était la première fois que je me séparé d'une maman poule oppressante, et que je gagnais un peu d'indépendance. Enfin, un peu.

« Alors ma chérie, tout se passe bien pour toi ? » Je soupirai intérieurement et roulai des yeux pensant que j'aurai droit à un sermon sur les bonnes manières si elle me voyait. « Hum... » Laissai-je échapper d'un air vague. Elle devait sûrement pensé que j'allai me dévergondé et adhérer à une secte dans cet endroit de débauche qu'était l'université. J'étais à l'autre bout de la ville, et elle m'appelait tous les soirs comme si j'étais à l'autre partie à l'autre bout du monde. « Tu sais, rien de plus qu'hier... Bon je dois me dépêcher, j'ai un cours. Embrasses Papa pour moi, à bientôt. » Je raccrochai le téléphone avant qu'elle ne réalise qu'il était neuf heure du soir et qu'il était fort peu probable que j'ai un cours maintenant. Mais je n'y pouvais rien, elle me rendait folle, ses coups de fils quotidien, cette voix toute guillerette, et puis j'avais largement mieux à faire qu'à passer la soirée au téléphone avec ma mère. Je me regardai dans le miroir plein pied pour la millième fois, de face, de dos, de profil, de trois quart … Je voulais juste paraître parfaite, j'avais un rendez vous important ce soir. J'enfilai une veste et des talons, pour paraître le plus sophistiqué possible, ce n'était pas tellement mon genre, les talons et tous le reste en général, le fait d'en faire des tonnes pour un garçon. Mais je n'allais pas à n'importe qu'elle soirée étudiante. J'avais rendez vous avec quelqu'un de plus mûr, de plus élégant, en gros de plus âgé. Craquer sur un professeur, c'était tellement cliché. Le passage quasiment obligatoire pour chaque étudiante. Mais pour moi c'était différent. Ce n'était pas qu'un flirt. C'était bien plus, je le sentais. Et j'ai toujours eu une excellente intuition.

« Je quitte la fac... J'arrête mes études... Je … Je suis amoureuse de Monsieur … Hum, je veux dire, de Gabriel, c'est ... mon professeur, et un élève ne peut pas entretenir de relation avec un professeur... Et puis, la fac, ce n'est pas fait pour moi, de toute manière. » Je tentai d'être persuasive mais je devais être ridicule avec ma petite voix à vouloir paraître sûre de moi et adulte. J'appréhendai la réaction de mes parents, mais je n'allai pas renoncer, je savais ce que voulais, c'était tellement clair. Je fermai les yeux un instant m'attendant à des cris, des larmes peut être, et des heures et des heures de disputes. Curieusement lorsque je les rouvris ce ne fut pas le cas. Pendant une seconde j'eus peur que ma mère fasse un arrêt cardiaque. Je l'imaginai déjà tomber tragiquement dans les pommes, la main sur le front, et mon père, l'index menaçant pointé sur moi, me reprochant d'être une fille indigne. Mais à la place, celle ci me regarda, versa du thé dans le service en porcelaine de Chine et but une gorgée interminable. Je voyais les minutes s'écouler, les pages du calendrier tourner. Ce fut le silence le plus lourd et embarrassant de toute mon existence. « De quoi est ce que tu parles ? » Un peu plus, et elle me riait au nez, ma mère ne me prenait pas au sérieux. Je crois que sur le moment elle ne réalisait pas. « Ce garçon que je vois, dont je vous ai parlé … Il s'agit de Gabriel … Mon professeur de français. » J'avais mis du temps à parler à mes parents de lui. Je leur avais dit que je voyais quelqu'un, en prenant bien soin de garder son identité secrète. C'était d'ailleurs le plus excitant au début, le côté secret et interdit. Avant que je tombe follement amoureusement. Je savais qu'ils n'approuveraient pas. Au fond, je ne pouvais pas leur en vouloir, mais je ne comprenais pas ce calme si étrange. « Je suis heureuse, vraiment, et j'ai trouvé ce job dans un boutique de vêtements, ce n'est pas grand chose pour le moment, mais ça peut évoluer ... » C'était vrai, j'étais sur un petit nuage et des rêves plein la tête. Mais je doutais que mes parents puissent comprendre, ils n'étaient plus amoureux depuis bien longtemps. « Attends … Tu plaisantes n'est ce pas ? »

« Je veux un bébé... » Soupirai-je d'un air las. Une voisine célébrait sa pendaison de crémaillère, elle et son mari avaient déménagé pour un appartement plus grand, le jeune couple était prêt à accueillir un enfant, et dans mon coin, je regardai tout le monde la féliciter pour son ventre rond, et lui dire combien elle était radieuse. Gaby ne pouvait pas avoir d'enfants, pourtant nous en voulions. C'était un sujet délicat, d'ailleurs il avait eu un empêchement ce soir là, et je me retrouvai seule avec ma cinquième coupe de champagne. « Je peux aider si tu veux. » Derrière cette voix amusée et ce sourire charmeur, se cachait un coureur de jupon au visage enjôleur, je lui donnai une tape sur l'épaule, avec un rire légèrement alcoolisé. « T'es bêêête ! »

« Non, non, non ! » Je secouai ce stupide bout de plastique comme si ça changer quoi que ce soit. « C'est pas possible ! Non, non, non ! » J'avais souvent imaginé ce moment de ma vie, quelques détails du scénario changeait au fil du temps, quand j'avais quinze ans, le père était Leonardo Dicaprio. J'allais avoir un petit bébé, j'allais devenir mère et j'allais sûrement être géniale, j'avais toujours eu l'esprit maternelle, et ça devait être merveilleux. Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Ce devait être mon happy-ending. Sauf que quelque chose clochait. Mes pensées se bousculaient dans ma tête et j'avais l'impression qu'elle allait exploser, je me poser beaucoup trop de questions, je n'avais aucune idées de quoi faire, j'étais complétement perdue. Pourquoi fallait-il que tout merde autant ? Que je merde autant ? Je voulais un enfant, c'était indéniable, mais il n'y avait qu'une seule personne avec qui je le voulais. Et bien évidemment, ce n'était pas lui le père. Mon karma s'était retourné contre moi. Je l'avais trompé, et j'allais en payer le prix. Mais après tout, nous allions avoir un enfant. C'était ce que nous voulions, le comment il est arrivé n'a pas d'importance au fond... Mais oui bien sûr c'est ça, Gaby allait être tellement heureux d'être père qu'il allait passer outre le fait que je l'ai trompé. Non, je ne pouvais pas lui faire ça. Je ne pouvais pas nous faire ça.